far far away

2h20 de trajet, tiens donc. Où est-ce que j'étais encore barrée, j'te le demande.

Quand même, le train, y a de drôle de personnages.

• D'abord y a le poétique.

Le penseur, appelle le comme tu veux. Il a les Illuminations de Rimbaud dans la main. Il pose le livre toutes les 2 minutes d'un air habité. Je lui dirais bien de tenter Aragon, mais p't'être juste qu'il aime pas la poésie. L'édition du bouquin est trompeuse, c'est celle qu'on demande aux étudiants. P't'être qu'il l'a juste pour faire bien, après tout Rimbaud comme par hasard. Tout le monde connaît Rimbaud. Eluard, ça aurait déjà été moins flag'. P't'être que sous la couv', y a un mini-porno. D'où l'arrêt toutes les 2 minutes. Hé ben, chapeau, il enchaîne vite.

• La pouffe.

Elle est belle, mais tellement cliché. Des cheveux magnifiques, incroyablement jolie. Elle a un truc. Un truc complètement gâché par la manière dont son corps fin, sexy et musclé est habillé. Parce qu'elle renvoie rien, on dirait une guirlande de Noël en juillet qu'on a oublié d'enlever. Jolie, mais hors sujet. Elle dégage rien. P't'être qu'elle planque plein de choses sous son ipod et ses 60 bijoux, son pantalon blanc et ses cheveux blonds lissés qui bougent pas. P'têtre que c'est tout ce qu'elle est et c'est dommage.

• Il y a monsieur Bruit.

Il est otut rouge, il boit une bière, change 4 fois de place, bouge sa grosse valise à chaque fois et hurle au téléphone. Y en a un comme ça dans chaque wagon. P'têtre que le téléphone ne fonctionne pas. C'est un téléphone en plastique, et il crie pour que monsieur Bruit du wagon d'à côté l'entende et lui réponde...dans son faux téléphone.

• La fille jolie.

Elle a l'air douce, le moindre de ses gestes est doux. Elle est au ralentit, avec musique de fond. Ca se voit qu'elle sent bon, et elle te souris gentiment quand tu la regardes. Elle à l'air sympa et même marrante. Si j'étais un homme j'voudrais la prendre dans mes bras et la protéger, parce qu'elle a l'air fragile. On dirait que derrière tout ce calme elle a pas confiance en elle et qu'il faut juste la rassurer.

• Il y a moi aujourd'hui.

"No one belongs here more than you", livre jaune flashy sur les genoux. Ou en train d'écrire. Ou de regarder dehors. Assise en tailleur, ou quasi couchée , l'esprit par la fenêtre. Ou encore une jambe sous l'autre, pour me caler. Les écouteurs toujours, Far far away de Lisa (lise?) Jsépukoi, You Father de Radio Dept. Les cheveux lachés, quelques bijoux, le regard fatigué de ceux qui n'ont pas passé le week end seuls. Le regard de ceux qui pensent à des choses qui ne se devinent pas, ou mal. De ceux qui ne sont déjà plus là, savourant le train en silence.

C'est si bon, d'être une parmi d'autres quelques heures. C'est si bon, de se persuader d'être différente quand on est anonymes.