Ouais mais non ah non pas du tout

J’veux pas faire ma psycho, mais y a quand même des choses qui vous pilotent une vie.

C’est drôle parce que j’ai toujours eu ce drôle de shéma avec lui, j’ai toujours espéré et j’suis toujours tombée d’un peu trop haut.

Même quand je coupe tout contact il arrive encore à me décevoir. Même comme ça il y arrive. Même là il arrive à faire une différence. Même là il arrive à me montrer que non, t’es moins bien Aude, tu mérites pas Aude. Depuis quand on mérite l’amour de ses parents, déjà ? J’suis bête j’croyais que c’était naturel. Normal, en fait. Faut croire que non, pas partout, pas avec tout le monde.

Alors j’avais gardé la base, au moins le joyeux noël, le bon anniversaire, bonne fête. Même si ça fait 18 ans que le diminutif familial paternel est sorti de mon vocabulaire au profit de son prénom, j’me disais quand, même, les bases.

La politesse au moins.

Mais lui il a fait comme d’habitude, j’ai parlé de moi, de mes souffrances, j’lui ai tendu la perche. Il a répondu en parlant de lui. C’est sa fierté qui a répondu. Alors un an de silence, un an sans mes nouvelles. Et puis réunion familiale alors je me suis dit, je vais quand même montrer que je vais bien. Je vais quand même le laisser savoir la silhouette de ce qui se passe dans ma vie. Il a répondu en parlant de lui à nouveau.

Et tu crois que ça suffit ?

Ah ben non tu penses bien. Il a fallu en remettre un bon coup. Encore un. Aller Aude, t’as une fonction punching-ball oublie pas. J’crois qu’il devrait déposer un copyright.

Alors j’me dis non.

J’me dis que ça c’est pas possible, c’est plus possible.

J’me dis que j’ai passé ma vie à me battre pour voir de la fierté dans ses yeux. Et qu’en face y a rien. Que je serais jamais plus que les soucis que j’ai apporté. Qu’il a jamais vraiment su qui j’étais. Que je sais pas ce que c’est d’être complice avec son père. Que ça me manque. J’aurais voulu qu’il soit là quand j’ai repeins mon appart, j’aurais voulu qu’il soit fier de moi, j’aurais voulu faire ça avec lui. Là-dessus j’lui ressemble, et quelque part ça me plaît. J’me dis

que j’viens pas de nulle part, que j’ai récupéré du bien là dedans.

Et parce que les relations familiales ne devraient jamais se limiter à des « parce que les conventions sociales disent que », à des « parce que c’est dans la norme », de toute façon lui il l’a jamais été avec moi. Et j’ai toujours voulu faire l’outsideuse.

Alors j’renie pas, hein, parce que j’peux pas changer le nom sur l’acte de naissance et que ça fait de moi ce que je suis.

Mais j’refuse d’être ce qu’il a construit en moi. J’refuse de garder contact avec quelqu’un dont les comportements ont orienté toutes mes erreurs.

Pour la toute dernière fois je me suis dit on peut peut-être construire une relation. Pour la toute dernière fois, je me suis trompée.

Va savoir pourquoi j’suis aussi impudique ces jours ci sur le blog. Tu sais c’est quoi le pire ? On croit que j’raconte tout, mais en vrai j’raconte rien.